L'alphabut : la lettre M - deuxième partie

Dirk Diederich
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L'alphabut : la lettre M - deuxième partie
Photo: © SC

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Valery Sorokin, Volodia, son agent, et Dupk négocient un contrat au Kave Mechelen. Peter Maes expose sa philosophie de jeu. C'est à prendre ou à laisser.

Mon ami, du haut de ses vingt-trois ans opine de la tête. Heberlué.

Fi embraie. « Si t’es d’accord, nous pouvons commencer à parler contrat » renchérit-il. Valery sollicite la permission de quitter les négociations, de laisser son agent régler les détails contractuels. « Je suis joueur de football. Les questions d’argent ne m’intéressent pas trop ».

Van Hoof, le directeur sportif du Malinwa sort un contrat type que je m’empresse de traduire à Volodia qui sursaute. Eclate d’un rire mauvais, caricatural, à la limite de l’impolitesse. Il faut le voir, lui l’ancien boxeur, l’ancien dirigeant de la fédération olympique russe de boxe. Un homme tassé et robuste.

Les Sang et Or proposent près de six mille euros nets par mois. « J ‘espère que c’est une plaisanterie, balança Volodia. Valery a accepté de jouer pour un salaire de misère au Brussels, car il voulait d’abord se faire connaitre. Mais là, ça suffit. Il ne jouera pas deux fois au rabais». J’atténue dans ma traduction néerlandaise la sècheresse des propos de l’agent en rajoutant que Sorokin gagnait jadis bien plus en Russie.

J’imaginais que les Malinois éclateraient, offusqués, scandalisés, suffoqués. Mais non ! Van Hoof respire la sérénité malicieuse. Calmement, il suggère à l’agent de faire à son tour une proposition. Volodia demande une feuille de papier et un stylo à bille. Maes retourne la feuille qu’il avait griffonnée de ses schémas tactiques pour la lui tendre avec son feutre. L’agent note des chiffres et les complète de brèves explications. Il sort une calculette, dresse l’addition et écrit douze mille quatre cents.

Fi Van Hoof, impassible, mais sans froideur, rétorque : « Si c’est un montant brut, on est d’accord ». Mais mon comparse sans attendre ma traduction hoche la tête et y va d’un « Niet, nets ». Je précise à mon tour : « Il demande douze mille quatre cents euros nets ! ». Van Hoof et Maes se regardent. Nous sommes rejoints par le trésorier du club qui regarde le calcul du Russe. « Impossible ! Arrêtons la discussion ! Ou alors écoutez moi ! On peut augmenter certains postes ! Le logement, la voiture, une indemnité nourriture, les frais d’essence, les charges diverses. On peut les prendre à notre compte. Mais douze mille euros nets, jamais ! Malines veut une gestion saine, pas de folies ! ».

Volodia tend les traits de son visage. Son regard se durcit pour autant que ce fut encore possible. Il se tait. Van Hoof, Maes et le trésorier se taisent également. Le silence pèse.

Mais qu’est-ce que je fous ici ?

Soudain, le trésorier sort une nouvelle proposition. Avec le Fonds de pension, le contrat dépasse de peu les dix mille euros nets. L’agent fait la moue. Hésite. Réfléchit. Et soudain décide de s’assouplir. « Je vais en parler à Valery. Peut-être arriverai-je à le convaincre » ajouta-t-il sur un ton étrangement conciliant. « Et mon travail, comment le gratifierez-vous ? » s’enquit enfin Volodia. Fi Van Hoof répondit aussitôt : « En Belgique, il y a des lois. L’agent du joueur perçoit sept pourcents de son contrat  ».

L’entrevue s’achève. J’ai l’impression de terminer sur une bonne note. Malines propose un contrat de trois ans. Volodia n’en demande que deux. Et réserve sa réponse pour le lendemain.

Nous retrouvons Valery dans sa voiture. Vladimir, -(Vlad c’est régner, mir, c’est le monde et Volodia, c’est le diminutif de celui qui règne sur le monde)-, explique la discussion que nous avons eue avec la direction malinoise. Valery écoute. Il a été sensible aux gestes prévenants des Malinois.

Je vois Valery déjà en jaune et rouge. Pour moi, le rendez-vous du lendemain à Gand est superflu. Je ferme les yeux. Je me vois supporter malinwa. Chanter à m’époumonner. Les gens de Malines, Fi Van Hoof et Peter Maes m’ont subjugué. Quel contraste par rapport aux négociations six mois plus tôt avec Johan Vermeersch, le président du Brussels.

Je me revois dans son bureau à Molenbeek avec Valery et Volodia. Les négociations avaient débuté à vingt-deux heures. Elle se poursuivirent d’abord jusque une heure du matin. Volodia avait obtenu au terme d’interminables discussions trente cinq mille euros nets pour cinq mois. Alors que je pensais la réunion terminée, j’étais crevé, j’avais travaillé toute la journée de huit heures du matin jusqu’à huit heures du soir, tout à coup, on joua les prolongations.

L’agent de Valery dit que son joueur avait vécu à ses frais durant la durée du test au Brussels, c’est à dire près de vingt jours. Il demandait si le club ne pouvait pas le défrayer. Vermeersch se renfrogna. Demanda combien il voulait. Vladimir effectua un rapide calcul de multiplication pour solliciter mille deux cents euros, soit cinquante-cinq euros par jour. Le président du Brussels s’empara du papier et après avoir sorti son porte-plume de sa poche, barra ce montant, et écrivit mille euros à la place.

(A suivre : vendredi soir, troisième et dernière partie de la lettre M)

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