Analyse Les sept péchés capitaux de Fred Rutten
Photo: © photonews
Fred Rutten n'aura donc tenu que quatre mois à la tête d'Anderlecht. Un mariage qui n'a jamais paru harmonieux et plusieurs points ont fini par condamner le Néerlandais.
Une personnalité (trop) discrète
Fred Rutten a, disons-le, l'air d'être un "bon gars". Jamais désagréable, jamais avare de sourires, calme, discret, humble, il n'avait rien à voir avec le personnage exubérant d'Hein Vanhaezebrouck. Le revers de cette médaille, c'est un manque de charisme certain. Peu loquace, pratiquant la langue de bois avec une décontraction épatante (ses conférences de presse étaient suivies avec une certaine résignation par la presse), il n'a jamais paru se rebeller, amener la passion dont doit faire preuve l'entraîneur d'un grand club en pleine tourmente.
Bien sûr, le calme est une vertu et les "grandes gueules" ne cadrent pas toujours avec l'image de classe que devrait renvoyer Anderlecht. Mais le peu de personnalité de Rutten donnait parfois une impression de déconnexion, voire de légèreté par rapport à un job qui ressemblait fort à celui d'intérimaire. Si le Néerlandais était là pour rester plus que six mois, il en donnait peu de signes...
Un statut d'intérimaire jamais vraiment évacué
Le point suivant est précisément celui-là : malgré ses maigres efforts et ceux, plus véhéments, de la direction, Fred Rutten n'a jamais été vu comme plus qu'un intérimaire par beaucoup d'observateurs. L'ombre de Kasper Hjulmand, surtout, planait au-dessus de son mandat, encore plus depuis que le Danois avait quitté Nordsjaelland fin mars. Au début des PO1, la rumeur d'une visite de Hjulmand à Bruxelles (il est en tout cas venu en Belgique) apparaissait, mettant encore un peu plus de pression sur Rutten.
Karim Belhocine a beau avoir été confirmé comme T1 intérimaire jusqu'à la fin de la saison, on a du mal à imaginer pour lui une histoire à la Ole Gunnar Solskjaer. Hjulmand est le candidat n°1 à la succession... de Hein Vanhaezebrouck. Tout n'aura jamais mené qu'à lui...
In youth he didn't trust
C'est l'un des plus gros reproches faits à Fred Rutten : celui d'avoir fait progressivement moins confiance à la jeunesse, brillante jusque là en majeure partie. Alors que les titulaires ne donnaient pas pleine et entière satisfaction, il se refusait à aligner des jeunes talents dont Anderlecht s'était fait une fierté. Les résultats ont d'abord parlé pour lui, mais il suffisait d'une mauvaise série pour que le public prenne en grippe l'absence d'enfants du cru au profit de Zulj, Gerkens, Obradovic, Appiah ou Lawrence.
Des éléments blacklistés sans explication
L'exemple le plus frappant est évidemment celui d'Alexis Saelemaekers, qui a été écarté du onze et même mis en tribunes alors qu'il était l'un des seuls joueurs d'Anderlecht à niveau en début de saison. Pas assez discipliné pour jouer au back ? On peut l'admettre. Mais pas assez bon pour obtenir sa chance plus haut en lieu et place, entre autres, d'un Zakaria Bakkali inefficace ? Une sombre histoire d'agent (l'agence s'occupant de Rutten aurait voulu attirer Saelemaekers, qui refusait) pourrait être derrière ce choix.
Mais ce n'était pas la seule victime du Néerlandais : Elias Cobbaut se serait entendu dire qu'il ne jouerait plus cette saison, Edo Kayembe n'avait également plus voix au chapitre... sans parler de Bubacarr Sanneh, fort critiqué certes, mais dont la concurrence n'a pas toujours été brillante. Jamais Rutten ne s'est expliqué - tout simplement parce que jamais Rutten ne disait grand chose. Mais la direction anderlechtoise n'en pensait pas moins, à coup sûr.
D'autres protégés sans raison
A l'inverse, plusieurs joueurs ont obtenu sous Rutten un crédit qui ne se reflétait absolument pas dans leurs prestations. C'est notamment le cas de Peter Zulj, titularisé bien trop longtemps pour son propre bien (jusqu'au retour de Trebel), ou de Zakaria Bakkali dont il a fallu attendre la blessure pour qu'il sorte enfin du onze. Aucun n'a apporté ce qu'on était en droit d'attendre de lui, mais Rutten, limité dans ses options par son système immuable, n'a jamais vraiment réagi.
Un système rigide et dépassé
Fred Rutten ne vivait que pour un système : le 4-3-3 à la néerlandaise, avec des ailiers vifs qui débordent et amènent le danger dans la boîte via des centres. Résultat : un jeu stéréotypé, incarné par des Bakkali ou Amuzu généralement peu lucides dans les derniers mètres et un Ivan Santini jamais bien servi et rarement inspiré. Seuls le génie de Yannick Bolasie et Yari Verschaeren (pas des plus à l'aise quand il se cantonne à son flanc, comme depuis quelques matchs) a amené l'étincelle par moments.
Le 4-3-3 de Rutten a bien sûr eu ses avantages : facile à appréhender dès l'arrivée du nouveau coach en plein milieu de saison, il a permis de redresser la barre. Le discours était clair : d'abord les résultats, ensuite le football. Mais le jeu n'a pas suivi et les résultats ont disparu. Mauvaise équation...
Le pire départ de playoffs de l'histoire d'Anderlecht
Le spectacle n'était donc pas présent en fin de phase classique, mais les Mauves n'ont au moins pas raté l'essentiel : le top 6. Aujourd'hui, certains se disent qu'il aurait mieux valu. Le bilan mauve est l'un des pires démarrages de l'histoire des playoffs : 0/12 pour débuter, seuls La Gantoise (cette saison également) et Zulte Waregem en 2010 ont fait aussi mauvais.
Impossible, même pour un entraîneur intérimaire, de survivre à de tels résultats. Karim Belhocine a 18 points à prendre ; le pire bilan de l'histoire d'Anderlecht en playoffs est de 11 points pris, en 2011. Les Mauves étaient passés de la 1ere à la 3e place. Un résultat qui semblerait presque être du luxe aujourd'hui.
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