L'Alphabut : la lettre U comme FC Union
Photo: © SC
Pour la lettre U de son Alphabut, Dupk reprend l'article qu'il avait consacré il y a peu au FC Union de Berlin où les supporters ont reconstruit leur stade.
U comme Union Berlin
Le football se tasse, s'embourgeoise, se racrapote, s'évanouit dans des stades cotonneux qui tiennent de la chaise roulante pour supporters paralytiques. A Berlin, le FC Union résiste avec un stade rénové tout en tribunes debout!
A l'heure où la Belgique pose sa candidature à l'organisation du Mondial de 2018 ou de 2022 dans le but plus ou moins avoué de renouveler son parc de stades, le débat sur l'essence même du stade de football mérite d'être mené. Car un stade de football n'est pas une salle d'opéra, un théâtre de luxe ou un Kinepolis aux sièges écoeurants de mollesse.
Or, l'Uefa et la Fifa anesthésient à petit feu le football populaire. Le dogme du confort et des sièges douillets envahit les stades pour en faire des mouroirs d'enthousiasme, des Villas Lorraines pour spectateurs balourds, tristes et friqués. Les normes européennes au travers de la licence UEFA, c'est la Commission européenne qui calibre les pommes de nos vergers et qui essaie de prohiber les reblochons et autres fromages goûteux.
Les enceintes stérilisées -un comble pour ces lieux qui devraient accoucher d'instants de frénésies!-aux sièges alignés règlementairement comme un défilé militaire au temps d'Auguste Pinochet, les tribunes pasteurisées aux vues imprenables sur l'écran video géant qui diffuse les messages publicitaires, sont aujourd'hui le modèle de ce qui se fait de mieux dans le pire. Dans ces ouates sirupeuses et tamisées, gluantes d'ennui, dans ces sarcophages hi-tech, seuls retentissent encore les complaintes de vuvuzelas en plastic et les décibels de sonos débiles comme un ultime chant du cygne.
Car voir un match de foot assis, c'est assister à un concert de la Mano Negra ou de Rage Against Machine dans la salle Henri Leboeuf à Bozar, c'est une nuit de noces passée en audience spéciale chez Benoit XVI au Vatican, c'est lire l'annuaire du téléphone comme un roman policier, c'est manger un demi sushi accompagné d'un verre d'eau minérale en lisant Ronsard dans un volume de la Pléiade alors qu'on partage la table avec Bacchus et Vénus (pour les lecteurs plus jeunes avec Pete Doherty et Zahia).
C'est ce que semble avoir compris le 1.FC Union de Berlin (D2 allemande), un club de légende, de sueurs et de saveurs populaires dont le stade "An der Alten Försterei" a subi un sérieux lifting lors de la saison 2008/2009. Aux antipodes du stade Olympique qui est une espèce de monstre sans âme, l'enceinte du FC Union a été rebâtie à peu de frais par deux mille trois cents supporters bénévoles qui ont consacré plus de cent quarante mille heures de travail au chantier de rénovation de leur stade historique. Le résultat? Un joyau de tôles et de pierres avec seize mille places debout comme autant de piques et de doigts d'honneur aux assis à triple mentons de la DFB, de l'UEFA et de la FIFA qui croient que le football vivant n'est qu'une copie de la dernière version du Fifa 2010 pour playstation.
Ce stade est une perle dans un monde d'huitres qui ne s'entrouvrent plus que pour bailler d'ennui. Le football y redevient rock'n'roll, poésie des gueux qui pètent dans toutes les dentelles (made in China) de la bienséance bourgeoise. Ce stade est un modèle qu'il faut d'urgence importer sous nos latitudes plutôt que de se laisser hypnothiser par le chant des sirènes des escrocs qui veulent nous fourguer leurs centres de gériatrie footballistique hors de prix.
Alors plutôt 60 "An der Alten Försterei" pour un retour aux essences que sept ou huit enceintes en 2018 comme autant de pierres tombales de luxe sur le macchabée de notre football anémié.
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