Coup de gueule : Bayat tel pour un massacre!
Photo: © SC
Studio 1, une fois n’est pas coutume, est sorti de son ronron hebdomadaire, de ses fausses insolences et de ses roulements de mécaniques playmobilesques pour nous donner enfin un bon moment de télévision.
Je n’ai pas la télé. Je suis ce qu’on appelle un avant-gardiste, un pionnier des générations nouvelles pour lesquelles la télévision se ramènera dans les temps futurs au statut de banal silex comparé à la communication de demain. Aussi, je ne regarde pas assidûment Studio 1, c’est le moins qu’on puisse dire. Tout au plus, de temps en temps, un extrait sur internet pour me rappeler comme cette émission -(malgré les présences avisées de Rodrigo Beenkens et d’Alexandre Charlier que j’apprécie) - tient largement du brouet cathodique, du somnifère aussi puissant qu’une lecture de l’Osservatore Romano ou qu’un spectacle ethnologique sous une Yourte mongole rythmé par des castagnettes post-modernes réalisées en berlingots de lait recyclés.
Stéphane Pauwels, je le voyais comme un paon, un petit coq monté sur ses ergots qui y allait d’emportements superficiels pour épater la galerie. La tchatche, il l’avait incontestablement, mais pour enfoncer sans risques et sans autres formes de procès des portes ouvertes seulement. Pauwels me semblait inaudible.
Mais aujourd’hui, en regardant l’extrait de l’émission de Studio 1 sur le site internet de la RTBF, je dois bien avouer que j’avais tout faux, que je connaissais mal le bonhomme, que je l’avais un peu trop hâtivement condamné. Ou alors, il a bien changé. Car l’histrion, sur ce qu’il a montré hier, a pris de la bouteille.
Les six minutes de télé auxquelles j’ai assisté valaient le détour. Pour peu, on se serait cru présent sur le plateau mythique de l’insurpassable Studio Sport de la télévision néerlandaise où des débats comme celui qui a opposé Abbas Bayat à Stéphane Pauwels sont monnaie courante. Mais là, on a assisté à bien plus qu’à un débat. On savait depuis 10 ans Bayat incontournable pour le Prix Citron annuel. En six minutes, grâce à Pauwels qui ne s’est pas démonté, on a découvert ce que l’humanité peut produire de plus excécrable : la ganache fin de lignée, suffisante et poudrée à la mort au rat, l’homme d’affaires à la voix de fausset et aux propos assassins.
Le propriétaire du club qui joue dans le stade du pays de Charleroi fait penser aux Assis de Rimbaud :
Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues
Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs,
Le sinciput plaqué de hargnosités vagues
Comme les floraisons lépreuses des vieux murs
Bayat croit qu’il a tout bon parce que ses comptes en banque puent le fric acquis à force de spéculations de faux derches. Bayat croit qu’il peut tout acheter, que le commun lui lèche les pieds, que le lâche lui mange dans la main, que l’aigreur est malice. Il croit avoir le droit d’insulter, de mépriser, d’être abject parce qu’il dispose du flouze.
Hier, Abbas Bayat a donc accusé Stéphane Pauwels d’être un clown. Puis, lui dont la famille a longtemps fait danser un shah-shah-shah morbide au peuple iranien, en mou du cul et du cerveau, y est allé d’un appel au meurtre qui valait pas mal de fatwas rétrogrades. « Il faut tuer les clowns » a-t-il déclaré avec la subtilité du garde-barrière d’Auschwitz. Prions pour que l’adage qui dit que « le ridicule ne tue pas » puisse se vérifier une fois encore.
Pauwels, et je lui tire mon chapeau, ne s’est pas dégonflé. Il a parlé valeurs humaines, âmes, supporters, respect et démocratie. L’autre en Louis XVI persan, maniéré comme un fauteuil du même nom, étouffait de suffisance, gloussait trois quatre invectives et pissait sous lui de haine pète-sec et hautaine.
Finalement, grâce au clown (moi, j’aime les clowns, monsieur Bayat), on comprenait que le Mambourg était devenu un cimetière aux mains de ce croque-mort sordide, un Père-Lachaise aux finances « saines », une pelouse de crématorium balayé par un vent glacial de cynisme. On pensait que le football wallon avait encore deux représentants en Jupiler League. Depuis hier, on sait qu’il n’y en plus qu’un.
Le seul faux-pas finalement de Stéphane Pauwels aura été de serrer après coup la main du fossoyeur du football carolo. Mais personne n’est parfait. Même notre Don Quichote d'un soir. Pauvres zèbres !
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