Mourinho et son management
Photo: © SC
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Serge Gehoulet, récent champion en P2 liégeoise avec Richelle United, mais également ancien membre du staff technique du Sporting de Charleroi et entraineur principal à l'AS Eupen, nous fait le plaisir de partager quelques conseils et astuces qu'il a accumulé durant plus de 20 ans de coaching.
Triplé historique avec l’Inter de Milan en 2010 : Championnat, Coupe d’Italie, Champion’s League.
Ci-dessous les piliers de son management de sportifs professionnels, qui ne sont jamais que des employés (presque) comme les autres...
1. "Une méthode globale"
José Mourinho décide en début de saison d'une feuille de route dont il espère s'inspirer jusqu'au bout de l'exercice. Il communique ensuite son plan à l'ensemble du club: aspects tactiques, physiques, psychologiques, d'encadrement... Chacun sait ce qu'on attend de lui et s'en trouve responsabilisé.
2. "Le groupe est plus important que l'individu"
Chacun doit faire le maximum pour aider le groupe. Chaque profil, chaque situation personnelle doit converger vers l'objectif initial fixé. Que ce soit le joueur qui est blessé et qui essaie de récupérer pour apporter sa contribution, le joueur qui est sur le banc et qui entre en jeu pour cinq minutes seulement, le joueur qui est sur le terrain et qui doit aider un coéquipier en difficulté...
Pour Mourinho, le cas de l'attaquant Samuel Eto'o est un bon exemple. C'est un grand joueur à vocation offensive, adoré du public. Mais lorsque l'équipe est en difficulté, c'est le premier à aider le groupe (voir sa finale de Champion’s League avec l’Inter de Milan)
Mourinho a sans doute plus vocation à "faire des résultats" qu'à produire du spectacle. "Vous vous prenez pour des stars? Pour moi, vous n'êtes que de simples joueurs dans une équipe qui doit gagner"...
3. "Rester en alerte face à la concurrence"
Le coach lusitanien n'hésite pas à renforcer la concentration de ses "employés-joueurs". Il évoque souvent la concurrence (l'autre équipe) qui pourrait utiliser les mêmes techniques et obtenir également des résultats. Une manière de maintenir l'état d'alerte et la concentration à un haut niveau ainsi que la volonté de se surpasser.
4. "The right man at the right place"
Bien s'entourer... Une équipe est composée d'un certain nombre d'individualités qui formeront le groupe. Dans le cas d'une équipe de football professionnelle, onze postes de "titulaires" sont à pourvoir. Pour Mourinho, il convient de procéder à une analyse détaillée de chaque poste en fonction des qualités nécessaires pour l'occuper: aptitudes athlétiques, techniques, type de personnalité...
5. "Le manager doit montrer une bonne image et être à l'écoute"
Pour cela, on peut compter sur celui qui fit aussi les beaux jours du FC Porto. Pour Mourinho, il n'y a pas de place pour le doute. Les choix et les objectifs du manager doivent être clairs. Il ne doit pas les remettre en cause.
De plus, la confiance est contagieuse et gagne tous les collaborateurs. Ne pas craquer, garder son calme et être très présent lorsque la situation l'exige sont des attitudes essentielles dans le travail du manager.
6. De la méthode:
Entraîner, c'est savoir accommoder les ego. A l'Inter, où l'effectif est constellé de stars, il y a de quoi faire. Mais, sur ce plan, Mourinho est imbattable. Sa gestion est simple: ils ne sont que des joueurs et rien d'autre. C'est lui qui décide quand, où et comment ils doivent jouer. Il n'y a que l'expression collective qui compte. Et finalement, "la" star de l'équipe, c'est lui. La réussite est indéniable: la force collective de l'équipe est impressionnante, chacun se "donne à fond" pour les autres et nul ne se risque à jouer les divas. Car si quelqu'un ne se plie pas à la méthode, la sanction est immédiate: Balotelli, longtemps écarté, peut en témoigner. Autrefois moquée comme une somme d'individualités plus ou moins talentueuses et souvent laborieuses, l'Inter n'a jamais autant ressemblé à une équipe en 2010.
7. Du mental:
L'Inter a longtemps eu l'image d'une équipe au mental friable, prompte à perdre ses moyens sous la pression. Avec "Mou", elle n'est plus rien de cela. Le Portugais ne doute jamais de lui ou des ses choix. Une confiance qu'il a transmise à son équipe. Et celle-ci, même sous la pression croissante de la Roma au cours des dernières semaines, n'a jamais craqué ni perdu son calme pour s'emparer du scudetto. En Ligue des Champions, le changement est encore plus phénoménal et après des années de désillusions, c'est désormais en favoris que les Nerazzurri s'apprêtent à aborder la finale à Santiago-Bernabeu.
8. Le jeu
Basé sur une grande discipline, une rigueur défensive de tous les instants et une capacité de contre importante,
surtout parfaitement organisé en défense
Une méthode et un style. Mourinho a d’abord une méthodologie: ce mot qu’il adore. Un bourreau de travail qui prétend, info ou intox, avoir regardé sept fois la vidéo du match aller Inter-Chelsea afin de préparer la seconde manche londonienne. Il n’est pas un inventeur de nouvelle stratégie du football (lire encadré). Mais il considère le terrain comme un échiquier, et il est un technicien absolu du placement des joueurs sur cet échiquier. Une défense de fer, et l’assignation d’une mission à chacun. Cela conduit plus à détruire l’adversaire qu’à produire du beau jeu, mais c’est terriblement efficace.
Sa formidable manière de gérer le groupe, les ego.» Le Portugais attire en permanence pression et agressivité sur lui, se posant en victime, imaginant complots, arbitres nuls, vomissant ou ironisant sur ses confrères. «Un grand acteur. Un véritable art de la protection de ses joueurs», poursuit Yves Débonnaire. «Il essaie toujours de les mettre dans les meilleures conditions, il n’a pas peur du conflit, ni avec les dirigeants ni avec les médias.»
Comme à Porto, comme à Chelsea, il recrute des joueurs qui lui correspondent et fait le ménage dans l’effectif : Eto’o, Milito, Lucio, Thiago Motta ainsi que les briscards comme Zanetti ou Cambiasso sont ses relais.
. Quand est arrivé Mourinho à l’Inter, on lui a demandé de gagner la Champions League. Quand il a fait sa première année, il s’est rendu compte de l’écart énorme qu’il y avait entre disputer la Champions et pouvoir prétendre aller en finale. Il a demandé 5-6 joueurs qui correspondent à une habilité technique, une vitesse et une expérience. Et je crois que la somme de ces joueurs a changé la philosophie d’un club, jusqu’alors en difficulté au niveau européen. Ils ont apporté de l’expérience comme Samuel Eto’o, de la fraîcheur comme Thiago Motta, Sneijder ou Lucio. Ce sont des joueurs avec une grosse volonté de montrer ce qu’ils valent vraiment. Notamment pour un joueur comme Milito qu’on n’attendait pas forcément à ce niveau-là. Comme il le dit lui-même, ces finales-là, il les a regardées à la télévision. Aujourd’hui, il peut être protagoniste. C’est dans ce type de joueur avec une certaine humilité que l’Inter est arrivée en finale.
9. La Personnalité
L’importance des langues et du bagout.
Est-ce vraiment cette machine à gagner, gavée de hargne et de rancœur ? Ce boutefeu qui dégaine sans peine son fiel dans les conférences de presse ? Ou un acteur qui préfère monopoliser l’attention et prendre sur lui toute la pression de manière à en décharger son équipe ? Un peu des deux surement. Il n’est assurément pas l’être vil et sournois que se plaisent à voir ses ennemis (qui sont nombreux) mais il n’est pas non plus ce philanthrope acceptant de prendre que lui un tombereau d’insultes pour protéger son équipe.
Il a donné une personnalité à une équipe qui en était dépourvue jusqu'alors. Sa personnalité hors normes et son autorité lui permettent de tout obtenir de ses stars.
Il y a deux aspects chez Mourinho, indissociables l'un de l'autre, qui lui confèrent ce statut à part dans la galaxie des entraîneurs. Sa compétence et sa personnalité. Sur le premier point, il fait l'unanimité.
Il est tellement intelligent" poursuit le président des Nerazzurri. "Mais le plus fort, c'est la capacité qu'il a de transmettre cette intelligence à ses joueurs et à son équipe." Mourinho, ou l'intelligent contagieux. Mais c'est vrai, Josè a donné la leçon contre Barcelone. Le "Fabulous Eleven" du Barça n'a pas eu raison du "Special one."
Entraîneur énervant, Mourinho se fait détester du reste du monde pour mieux fédérer autour de sa personne ceux qui lui sont proches: staff, joueurs, supporters. Il défend toujours ses joueurs quand ils sont attaqués, se réservant seul le droit de les juger.
A moins qu'ils n'adhèrent pas à ses principes d'exigence, comme Balotelli, les membres de son effectif n'ont rien à craindre. Mourinho est prêt à tout pour eux s'ils sont prêts à tout pour lui. Il est un pare-feu.
Il se plait à cristalliser autour de sa personne les critiques et parfois même la haine. Il aime qu'on l'aime mais se délecte plus encore de l'inimitié qu'il peut provoquer. En ce sens, il y a du Domenech chez lui, sauf que le sélectionneur tricolore a camouflé la partie séduction pour ne garder que la faculté à exaspérer.
Source FIFA.COM/ L'Equipe.fr
A méditer : « « Le talent permet de gagner des matchs, mais le travail d’équipe et l’intelligence permettent de gagner les championnats » (M.Jordan)
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