Les opaques relations russo-londoniennes de Vitesse Arnhem

Les opaques relations russo-londoniennes de Vitesse Arnhem
Photo: © photonews

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Comment Vitesse Arnhem, proche de la faillite en 2010, a-t-il depuis dix ans pu retrouver le subtop néerlandais et enregistrer quelques uns de ses meilleurs résultats ? Grâce à sa proximité nouvelle avec le Chelsea de Roman Abramovitch. Une relation opaque.

Vingt-neuf. Voilà le nombre ahurissant de joueurs ayant été envoyés en prêt au moins une fois à Vitesse Arnhem en provenance de Chelsea. De quoi faire de l'un des plus anciens clubs professionnels néerlandais encore activité un vulgaire "satellite" des Blues, et ce dans des proportions bien plus larges encore que celles constatées au sein de partenariats comme le City Football Group ou la galaxie Pozzo. Seule comparaison proche possible : la filiation Cercle-Monaco, qui a déjà vu 28 joueurs être envoyés en prêt depuis le Rocher. 

Pourtant, en 2010, quand Merab Jordania, ancien international géorgien devenu homme d'affaires, reprend un Vitesse Arnhem qui vient de terminer 14e d'Eredivisie, aucun partenariat officiel avec Chelsea n'est annoncé (et aucun ne le sera jamais, pour ce que cela vaut). Il faut gratter un peu le vernis pour comprendre les liens entre Jordania et les Blues. Et dès la reprise, la Fédération néerlandaise s'y essaiera. 

L'homme de paille d'un homme de paille 

Car dès l'arrivée de Jordania à Vitesse, en plus de quelques compatriotes géorgiens qui ne font pas hausser de sourcils (Guram Kashia deviendra même le capitaine et joueur étranger le plus capé de l'histoire du club) débarquent également d'emblée trois prêts de Chelsea - Delac, Matic et Rajkovic. Les premiers d'une longue série. La fédération enquête alors sur les liens supposés entre la société par laquelle est passé Jordania pour racheter Vitesse, Marindale Trading, et un oligarque russe proche d'Abramovich, Aleksandr Tchigirinski. Roman Abramovich possède 16% des parts de l'entreprise de ce dernier (Snegri Development), qui aurait ensuite aidé Merab Jordania à reprendre Vitesse Arnhem. 

Mason Mount, l'un des prêts les plus réussis de Chelsea à Vitesse 

L'enquête de la KNVB fera chou blanc : aucune preuve formelle ne peut être faite quant aux liens supposés entre Abramovich et les investissements de Jordania, donc entre Vitesse et Chelsea. Peu importe que le Géorgien soit parfois aperçu à Stamford Bridge, ni que les transfuges en provenance de Londres débarquent à chaque mercato. Jordania, lui, a les ambitions de ses moyens : dès son arrivée, il promet le titre des Pays-Bas aux supporters, et les résultats suivent. Lors de la saison 2012-2013, bien aidé par un Wilfried Bony (transféré pour 4 millions) en feu et auteur de 31 buts mais aussi par trois joueurs arrivés de Chelsea (Van Aanholt, Kalas et Kakuta), Vitesse joue les premiers rôles en Eredivisie, sous la houlette d'un certain ... Fred Rutten

"Londres est intervenu"

C'est là que l'affaire se corse. Lors du mercato hivernal, tout semble bien parti pour que Kevin Leerdam rejoigne Vitesse et permettre au club de réellement titiller l'Ajax dans la course au titre. Il n'en sera finalement rien, et le club à l'aigle va même s'effondrer pour terminer la saison quatrième. Dans la foulée, en octobre 2013, Jordania est démis de ses fonctions et remplacé par ... Alexander Tchigirinski, l'oligarque proche d'Abramovich. Et le Géorgien, qui vit très mal cette disgrâce, va lâcher une bombe dans Voetbal International : il affirme que Chelsea, qui gère selon lui tout ce qui se passe à Arnhem, a empêché son club satellite de se renforcer lors de l'hiver 2013, ne voulant pas voir Vitesse jouer la Ligue des Champions. "Londres est intervenu. Personne à Chelsea ne voulait nous voir être champions et jouer la C1". Les risques de conflits d'intérêt étaient trop élevés, assure le Géorgien.

Fred Rutten aurait pu mener Vitesse bien plus haut que la 4e place en 2013

Bien sûr, les propos de Merab Jordania, niés en bloc des deux côtés de la Manche, amènent l'ouverture d'une nouvelle enquête de la KNVB. Rutten, interrogé par le Guardian pour une enquête de référence sur le sujet, reconnaît avoir été "très surpris" à l'époque quand, alors que tout était prêt pour l'arrivée de Leerdam, le joueur n'est pas venu. Il avait entendu les rumeurs concernant l'implication de Chelsea, sans preuves. Des preuves, la fédération néerlandaise n'en trouvera pas non plus, et la petite entreprise gueldro-londonienne ne connaîtra pas la crise.

En 2018, Valeryi Oyf récupère les actions de Tchigirinskyi. Oligarque lui aussi, il est présenté comme un "ami" de Roman Abramovich par le directeur sportif Johannes Spors, qui nie que les relations entre les deux clubs aillent plus loin que cela et refuse avec force le terme de "club-satellite". Oyf a travaillé toute sa carrière main dans la main avec le propriétaire de Chelsea, que ce soit à la tête de la compagnie pétrolière Sibneft ou de Millhouse LLC, société créée spécifiquement en 2001 pour gérer les acquis d'Abramovich et dont Oyf a été directeur général. Cette saison, cependant, aucun joueur de Chelsea n'est à signaler dans les rangs de Vitesse Arnhem, en bonne partie à cause des nouvelles législations de l'UEFA concernant les prêts de joueurs. Le "FC Hollywood du Rhin" (surnom ironique du club) pourrait donc bientôt être quitte de son encombrant "ami" londonien ... 

Diverses sources (en anglais et français) utilisées pour cet article, à découvrir pour approfondir le sujet  

https://www.theguardian.com/football/2017/feb/28/chelsea-vitesse-arnhem-links-deeper-public-told

https://www.sofoot.com/arnhem-a-toute-vitesse-177021.html 

https://www.footballparadise.com/chelsea-vitesse/ 

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