Vista local: Kramer contre Kramer : quel cinéma !

Olivier Baute
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Vista local: Kramer contre Kramer : quel cinéma !
Photo: © photonews

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La Coupe du Monde a beau avoir rangé ses habits de cérémonie, Bernardo poursuit l'aventure avec Walfoot. Son analyse est toujours aussi acérée.

Remplaçant Kedhira blessé lors de l'échauffement, Christoph Kramer, numéro 23 de 23 ans, actif à Moenchengladbach - comment appelle-t-on les habitants de Moenchengladbach ? -, 1m89 et 73 kilos, a cogné méchamment fort le joueur argentin Garay à 13ème ou 14ème minute de jeu. A la stupéfaction de mon entourage, regardant son visage en gros plan à la télévision, qui le disait knock-out, il a été renvoyé au jeu, on ne sait pas trop bien par qui, mais certainement avec l'assentiment du médecin de la sélection allemande. Il va y rester debout comme une plante jusqu'à la 32ème minute de cette même première mi-temps, sans que ni le staff médical allemand, ni les arbitres, ni les entraineurs, ni ses coéquipiers ne réagissent à sa détresse, pourtant bien visible.

Il a déclaré ne pas se souvenir de cet accident, de ne se souvenir de rien de ce qui s'est passé durant cette première mi-temps et de ne pas savoir comment il est sorti du terrain ni regagné les vestiaires...


Bien sûr, ce K-O n'est pas aussi spectaculaire que celui de ce coureur cycliste qui, suite à une chute, repartit à contre sens dans une étape du Tour de France ou de ce milieu de terrain qui tira au goal contre son camp après un choc sur la tête. Mais l'absence de mouvement des yeux étaient visibles même sur un smartphone.

Il ne s'agit pas là d'une agression violente, mais bien de ce que les Brésiliens appellent d'un accident résultant d'une action de jeu. Ce qui, parfois, me donne l'impression d'expliquer et excuser toute action violente.


FIFPro, l'Association des Footballeurs du Monde, a demandé à la FIFA de " mener une enquête approfondie sur son propre protocole lors de commotion cérébrale survenant lors d'un match." Elle fait observer que ce choc est l'un des nombreuses blessures graves survenues à la tête lors de ce Mondial. Elle cite et illustre par des extraits vidéo les chocs entre l'arrière argentin Javier Mascherano avec le joueur hollandais Georginio Wijnaldum lors de la demi-finale Argentine - Pays-Bas, Le joueur resta provisoirement hors du jeu mais revint finalement sur la pelouse. Elle cite encore le cas du joueur uruguayen Alvaro Pereirra, inconscient suite à un knock-out sur le terrain, à qui on fit respirer des sels et qui fut renvoyé sur le terrain une minute plus tard.


Nos amis et fidèles lecteurs connaissent ma préoccupation sur ce sujet. Dans un article précédent, j'ai relaté les résultats d'une enquête hospitalière démontrant que plus de 73% des footballeurs professionnels ont des séquelles dues à un traumatisme crânien. Mais il me semble qu'il n'y a jamais eu autant de chocs entre les têtes que lors de cette coupe du monde, sans doute aussi parce que la FIFA a rappelé que les bras devaient rester le long du corps.

Alors que je pensais que les fautes de coudes et de bras lors des sauts étaient des actes de violence préparés lors des entrainements, je me suis rendu compte que, comme le genoux en avant du gardien, ils étaient parfois, - j'écris consciemment parfois en pensant quelques fois - des gestes d'auto-défense, si et seulement si ils concernent des joueurs de même taille ou de même altitude dans la détente.

Lors du match de barrage retour de coupe de l'UEFA, entre Anderlecht et Lyon le 25 août 2009, le consultant de ESPM Brasil, Falcão, crack ayant gagné la Coupe du Monde et entraineur au Brésil,
s'en est pris violemment à Ariel Jacobs, l'accusant de placer sciemment sur le terrain des joueurs quelconques (notamment Gillet qu'il cita nommément) pour leurs brutalités physiques apprises à l'entrainement, dont les fautes de bras dans les sauts, en laissant sur le banc un fin technicien comme Suarez qu'il avait déjà rencontré à plusieurs occasions. Il ajouta que ce choix du combat physique
expliquait sans doute la décadence des clubs belges dans les compétitions européennes.


C'est bien exact que les agressions contre les joueurs adverses font partie des consignes des entraineurs et, par corollaire, des entrainements des clubs professionnels. Le premier entraineur qui l'avoua publiquement fut Rinus Michiels lors d'un table ronde à Monaco, ce qui dégoûta du football pour un certain temps le Prince Rainier. Ce fût confirmé par un joueur hollandais du PSV qui s'excusa d'avoir blessé un adversaire, en expliquant qu'il avait reçu la consigne de le sortir du terrain et qu'il avait essayé de le faire sans que cela ne soit trop grave. Un malheureux concours de circonstance en avait décidé autrement.


En Belgique, le niveau de danger physique a considérablement augmenté à cause, me semble-t-il, de Benoît Thans qui a imposé, contre l'avis d'un ancien arbitre professionnel, sans que personne ne pense une seule fois en plus de 5 ans à relire publiquement le texte de la loi, - de quoi bien s'ancrer dans la vase de l'arbitraire, que tout était permis si le joueur touchait d'abord le ballon. Ainsi, dans tous les clubs amateurs ou professionnels et dans toutes les catégories d'âge, des entraineurs ont appris à leurs joueurs de faire un slidding-tackle en touchant le ballon du pied droit et la cheville ou la jambe de l'adversaire du pied gauche et réciproquement.


Loi 12 : Coup franc direct

Un coup franc direct est accordé à l’équipe adverse du joueur qui, avec imprudence, témérité ou excès d’engagement :

  • donne ou essaye de donner un coup de pied à l’adversaire ;
  • fait ou essaye de faire un croche-pied à l’adversaire ;
  • saute sur un adversaire ;
  • charge un adversaire ;
  • frappe ou essaye de frapper un adversaire ;
  • bouscule un adversaire ;
  • tacle un adversaire.

Interprétation de la loi 12, extraits :

Inadvertance, témérité, excès d’engagement
Par « imprudence » on entend l’attitude d’un joueur qui charge un adversaire sans attention ni égard, ou qui agit sans précaution.

  • Une faute commise par imprudence n’appelle aucune sanction disciplinaire supplémentaire.

Par « témérité » on entend l’attitude d’un joueur qui agit en ne tenant aucunement compte du caractère dangereux ou des conséquences de son acte pour son adversaire.

  • Un joueur qui fait preuve de témérité doit être averti.

Par « excès d’engagement » on entend l’attitude d’un joueur qui fait un usage excessif de la force au risque de blesser son adversaire.

  • L’usage d’une force excessive doit entraîner l’exclusion.

Ainsi, en Belgique, certains joueurs se sont spécialisés dans les semelles agressives ou défensives, comme les récidivistes Ruytinx, Vainqueur, Defour, Mbokani ou Batshuayi, bien connus pour leurs
performances périodiques en la matière. En général, cet acte est détesté par leurs propres supporters, qui ne sont pas dupes.

Nous avons vu précédemment aussi que la vitesse est une facteur aggravant des conséquences de la faute, simple application des lois physiques concernant les forces mécaniques. Alors regardons ce
qui se passe dans les sports de ballon les plus rapides. En football américain, en rugby ou en hockey sur glace, la violence a été intégrée dans le sport et son intensité est régie à la fois par des obligations de protection physique, notamment le casque, d'assurances et de règles.


Ainsi, en hockey sur glace, les joueurs peuvent se battre s'ils laissent tomber les gants... Les actes de violence sont exploités en marketing par les fédérations et les sponsors, notamment par des droits sur les retransmissions des agressions et les diverses compilations.

Un seul sport a choisir de bannir la violence : le basket-ball qui a créé la faute offensive ; tandis que le handball et le volleyball, à la recherche d'une meilleur visibilité médiatique, semblent toujours
hésiter. "Nous sommes des professionnels", disent les joueurs. Des professionnels, pas des sportifs, disait le champion cycliste allemand Rudy Altig, ne comprenant pas l'interdiction du dopage.

Le fait que des nouveaux sports chaque fois violents prennent la relève médiatique des sports qui adoptent des règles visant à limiter cette même violence interpellent sur le désir des spectateurs. C'est le cas de la lutte libre qui succède en popularité à la boxe anglaise.


Il me semble que lors de cette Coupe du Monde, la FIFA avait fait le choix d'en revenir à un jeu plus sportif, privilégiant la finesse du geste technique à la force du choc physique. Les maillots collants - qui empêche le fait de tirer dessus - ont enfin été acceptés, les interprétations ont rappelés que les bras devaient rester le long du corps et que la force physique devait être appropriée, ce qui est expliqué par la règle d'interprétation qui précise que, en aucun cas, l'intégrité physique du joueur adverse ne peut être menacée, comme le lecteur l'a lu. Je pense que c'est clair et sans ambigüité. Cela a bien fonctionné pendant la phase de poule avec comme point d'orgue cet arbitre qui sifflait faute contre Fellaini dès qu'il regardait le ballon. Lors des matchs à élimination directe, le laisser blesser est revenu en force.

Cet accident de Kramer met en évidence un autre point qui me laisse réellement furieux : c'est la préférence que les entraineurs accordent aux joueurs blessés plutôt qu'à des joueurs remplaçant en
forme. Je trouve cela aussi criminel qu'incompréhensible. Car enfin en quoi un joueur groggy comme Kramer apportait-il un plus à son équipe qu'un Schurle en pleine forme ? N'est-ce pas absurde ?

Ma conclusion sera courte - tout arrive - : l'espérance de carrière professionnelle au plus haut niveau d'un quaterback dans le football américain est de 3 ans. Souhaite-t-on en arriver là dans le
football ?

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