Interview Entretien avec Mikhail Turi, remplaçant héroïque d'Hernan Losada pour les trois derniers matchs de l'histoire de Deinze : "Belhocine, Englebert et Leye m'ont félicité"
Le KMSK Deinze aura disputé les trois derniers matchs de son histoire avec Mikhail Turi à la barre. L'entraîneur français, décidément spécialisé dans les opérations d'urgence, revient sur ces dernières semaines particulières.
Comme nous vous en parlions ce mardi (lire ici), la faillite du SK Deinze est devenue officielle, ce mercredi. Le Matricule 818 disparait et ne terminera pas le championnat, ce qui chamboule totalement le bas de tableau, en Challenger Pro League.
Le repreneur du club, Doudou Cissé (AAD Invest Group), n'a jamais fourni les fonds nécessaires, et a même fermé le robinet. Les joueurs et le personnel n'étaient plus payés depuis des mois, ce qui a causé un mouvement de grève général au sein du club. Les joueurs du noyau A ont refusé de jouer, Hernan Losada n'a plus entraîné.
Mikhail Turi appelé en mission sauvetage pour remplacer Hernan Losada
Dans la panique, le SK Deinze a fait appel à Mikhail Turi, alors entraîneur des U21 du club, pour mener la barque en attendant les décisions judiciaires. Avec, d'abord, une équipe entièrement composée de jeunes joueurs du club, rejoints ensuite par certains membres du noyau A souhaitant poursuivre l'aventure, Turi a passé trois matchs sur le banc de l'équipe première : contre les Francs-Borains (d. 0-3), au RFC Liège (d. 3-0) et face au RFC Seraing (d. 0-1).
J'aime relever des défis et le niveau professionnel est celui auquel je veux entraîner - Mikhail Turi
"Je n'avais pas trop de pression, mais j'étais un petit peu gêné par rapport à la situation des professionnels et je ne savais pas trop sur quel pied danser. Puis, j'ai reçu un super message de Gaëtan Hendrickx, qui m'a dit de foncer. Je me suis retrouvé avec quelque chose que je n'avais pas demandé, mais je suis ambitieux, j'aime relever des défis et le niveau professionnel est celui auquel je veux entraîner", détaille, en ce sinistre mercredi, Mikhail Turi pour Walfoot.be.
L'entraîneur français, qui officie également au Futurosport de Mouscron, où il dispense des entraînements pour les jeunes du sport-études, ainsi que des cours d'entraîneur pour les futurs diplômés, n'avait, certes, pas demandé à se retrouver dans une division professionnelle avec une équipe qui n'en avait, logiquement, pas le niveau. Mais au vu de la situation du club depuis le début de la saison, Turi avait tout de même préparé le coup.
"On avait eu des alertes sur quelques incohérences au niveau du club, on avait aussi lu certains articles dans la presse. J'avais dit à mon staff qu'il fallait faire attention et se tenir prêt pour plusieurs scénarios. Celui que j'aurais préféré, c'est qu'un investisseur arrive et paie. Mais on se disait aussi qu'il était possible qu'on prenne la place des pros. Enfin, on espérait surtout que le club ne tombe pas en faillite."
Mikhail Turi et ses idées ont été la dernière éclaircie dans le chaos de Deinze
C'est donc cette troisième possibilité, la pire, qui s'est produite. Mais pendant sa courte période à la tête de la jeune équipe de Deinze, Mikhail Turi a reçu un paquet d'éloges. Notamment de ses trois homologues, Karim Belhocine, Gaëtan Englebert et Mbaye Leye.
Mikhail Turi a en effet su accomplir de belles choses avec sa jeune équipe, comme il avait pu le faire dans une autre situation chaotique, à Mandel, en reprenant une équipe dépourvue d'adultes, qui venait de subir un 9-0 sur la pelouse de Liège la semaine précédente, en Nationale 1.
Je parviens à m'en sortir dans les situations d'urgence... ce qui pourrait être un bel atout pour les clubs professionnels" - Mikhail Turi
"J'ai reçu beaucoup de messages de félicitations et de soutien, c'était incroyable. Le public du RFC Liège nous avait aussi rendu un bel hommage. La situation vécue à Mandel m'a évidemment servi, parce que dans les deux cas, il a fallu faire dans l'urgence. Il faut recadrer l'équipe, remettre une bonne mentalité, une vraie philosophie de travail, de la cohésion. Ce n'est pas l'atout que je préfère, j'aimerais œuvrer dans un club stable comme était censé l'être Deinze, mais il est vrai que je parviens généralement à réussir dans les situations d'urgence. Cela pourrait d'ailleurs être un atout pour certains clubs professionnels."
Car si le SK Deinze de Mikhail Turi a bien subi trois défaites, ses prestations ont été dignes, valeureuses et pas si faciles pour leurs trois adversaires, pourtant nettement supérieurs sur papier. "Nous avons appris en dernière minute que nous devions jouer contre les Francs-Borains, tout le monde nous prédisait une défaite 7, 8 ou 9-0. Mais avec mon effectif, je savais qu'on pouvait faire de bonnes choses. On prend des buts sur des petites erreurs de jeunesse, mais le jeu était relativement égal. On s'est beaucoup battu, avec du caractère et l'ambiance dans le groupe était finalement bonne malgré la situation."
Les pros auraient aimé que je termine la saison avec eux" - Mikhail Turi
"D'ailleurs, les pros m'ont dit qu'ils auraient aimé que je termine la saison avec eux. Ils ont aimé ma façon de fonctionner, mon caractère et le style de jeu qu'on essayait de mettre en place. Denys Prychynenko (ndlr : membre du noyau A qui n'a pas joué sous Turi) m'a envoyé un message après le match de Seraing pour me dire qu'on n'avait pas joué pour ne pas perdre, mais bien pour gagner. C'est un message qui m'a fait très plaisir."
Retrouver un banc dans un club professionnel, le nouveau défi de Mikhail Turi
Si, à contrecœur, Mikhail Turi doit donc mettre fin prématurément à son aventure à Deinze, l'entraîneur français espère recevoir une nouvelle chance de se montrer dans le monde professionnel. Et cette fois, avec de réels moyens sportifs à sa disposition.
"Je connais déjà les ficelles de la Challenger Pro League, je sais ce qu'il faut pour réussir dans cette division. L'objectif, à Deinze, était que je commence avec les U21, puis, quelque temps plus tard, que je reprenne le noyau A avec plusieurs jeunes qui seraient montés avec moi. C'était un projet intéressant pour moi et c'est toujours en fonction du projet proposé que je fais mes choix."
"Avec mon expérience, je veux rester dans le monde professionnel. J'aimerais trouver un projet stable et prouver que j'ai les compétences pour coacher en Challenger Pro League", a conclu un Mikhail Turi qui, sans nul doute, observera attentivement la situation dans le bas de tableau.
Inscrivez-vous maintenant à la newsletter de Walfoot