Coup de gueule (de bois) : le calice jusqu'à la lie!
Photo: © SC
Jason Vandelannoite vient d'être mis à pied pour comportement peu compatible avec le statut d'un joueur de football professionnel. Dans le pays de la Jupiler League, c'est pousser le bouchon un peu loin.
Jason Vandelannoite est de la lignée des enfants terribles du football, de ceux qui allient joie de vivre, esprit festif et talent de surdoué sur un terrain. Il est de ces joueurs qui arracheront toujours jusqu'au paradis un sourire complice de George Best et de Roger Claessen. Il est de ceux qui comme le Gilles Van Binst ou Jacky "Tuborg" Teugels ont donné un peu de cul à la bouteille d'eau plate du football belge. De ceux qui respirent le foot à pleins poumons, joueurs jusqu'au bout de la vie, là où d'autres ne renvoient qu'une pâle image dans l'eau qu'on dit "bénite" du marigot du jeu à onze.
Jason Vandelannoite n'a jamais été pris en défaut sur un terrain de football. Normal : il y est lui-même. D'une pièce. Tout de générosité. Allant au bout de l'effort. Bondissant inlassablement comme pour se moucher dans les étoiles. Se jetant corps et âme en avant pour récupérer un ballon impossible. Toujours fair-play, il ne ment jamais dans l'effort. Il est de feu, il est de flammes, bref, il est de ces joueurs dont le supporter raffole.
Les directions des clubs de football n'aiment pas les reliefs, les aspérités, les fantaisies dans leur monde qu'ils veulent lisse comme une décoration de fast-foot. Dans un univers gangrené par l'argent facile et douteux, où les victoires et les défaites sont désormais cotées en bourse du côté de Shangai ou de la côte croate, les directions la sur-jouent "père-la-vertu" dès que le vent balaie l'image d'Epinal de leur univers policé.
Les voilà soudain qui mettent sur la place publique des faits qui relèvent de la vie privée, sans autre forme de procès. Vrais? Faux? Rumeurs? Commérages en paroles d'Evangiles? Qu'importe! Le sportif doit marcher droit, au pas d'oie, l'index sur le pli du pantalon, le sparadrap de l'obéissance collé sur la bouche. Aucune contestation n'est possible. Pas de syndicats. Pas de solidarité. Car le monde des joueurs de football professionnel est un désert social, une ode au déni des droits.
Le joueur ne peut se défendre. Il ne peut gueuler son indignation. Il ne peut donner sa version des faits. Il se brûlerait à tout jamais en Jan Palach des années 2010. Cloué au pilori, il a plutôt intérêt à la jouer modeste, à raser les murs, à tenter de se faire oublier quelques temps. Sous ses airs de Dieu des stades, le footballeur cache en fait un statut de sous-fifre, d'employé sans droit, de fonctionnaire de la Corée du Nord. Il sourit. Il grimace à l'écran. Il prononce au micro ou dans les journaux deux trois phrases convenues, banales avant de replonger dans un mutisme comme-il faut.
S'ils gagnent parfois beaucoup d'argent, les joueurs le paient au prix fort, à la façon des candidats des cyniques et funestes Big Brothers télévisuels.
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